Le camembert, ce fromage rond à pâte molle et croûte
fleurie, si emblématique de la culture française, se retrouve
au cur d'enjeux que Marie Harel, considérée comme son
inventrice, était certainement loin de prévoir il y a quelques
années.
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L'INAO vient de renforcer le cahier des charges de l'AOC
camembert de Normandie et ne se plie pas à le demande de modification
de l'industrie laitière. © Getty Images
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Mais début 2007, les marques Le Petit, Lanquetot et Isigny-Sainte-Mère
ont pris le parti d'abandonner l'étiquette AOC en produisant certains
de leurs camemberts avec du lait thermisé et non du lait cru.
Les raisons de ce revirement sont à la fois sanitaires et économiques.
Dans un camembert au lait cru, les germes pathogènes auront plus de
facilité à se développer que dans un camembert au lait
thermisé ou pasteurisé, chauffé à haute température.
La précaution sanitaire paraît donc un élément
essentiel pour l'industrie laitière qui produit des camemberts en
masse. Et c'est aussi l'argument qu'elle met en avant auprès de
l'INAO pour un assouplissement de l'AOC. Mais une décision de l'INAO
vient d'être rendue et devrait être publiée prochainement dans
le cadre d'une réforme de l'AOC : "À partir du 1er janvier 2015,
les exploitations comportent au moins 25 % de leur effectif de vaches
laitières en vache de pure race normande, et 50 % à partir de
2020." (source INAO). Le camembert au lait cru à donc la vie sauve.
C'est le 20 janvier 1926, suite à un verdict de la cour
d'appel d'Orléans, que le nom de "camembert" est déclaré
public. Seule la mention du lieu de fabrication est obligatoire.
"A partir du 1er janvier 2015, les exploitations
comportent au moins 25 % de leur effectif de vaches laitières
en vache de pure race normande" |
Le camembert peut donc être fabriqué avec du lait pasteurisé
et n'importe où : en Bretagne, Pays-de-Loire, Lorraine, Charentes...
Quant à l'AOC au lait cru, elle existe depuis 1983 et permet de maintenir
la fabrication en zone géographique normande originelle, avec lait
cru et moulage à la louche.
À noter qu'un volume de production au lait cru plus important coûterait
très cher aux marques qui ont opté pour le lait thermisé,
du fait d'une fréquence obligatoirement plus élevée
des contrôles bactériologiques.
Enfin, du côté des consommateurs, ceux-ci ne sont guère
satisfaits de ces changements dans leurs assiettes : ils dénoncent
un goût affadi, neutre et un affinage médiocre. Pourtant,
les industriels affirment, après de nombreuses dégustations
à l'aveugle dans leurs laboratoires, que les propriétés
organoleptiques (goût, odeur, texture) du camembert au lait thermisé
sont identiques à celles du camembert au lait cru. Ce n'est pas de
l'avis des consommateurs ou de chercheurs qui confirment qu'il y a un risque
d'uniformisation car la diversité organoleptique diminue avec le lait thermisé.
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Définitions des mentions
de lait |
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Lait cru |
Pour les produits fabriqués à partir de lait non chauffé au-delà
de 40 °C ni soumis à un traitement non thermique d'effet équivalent,
notamment du point de vue de la réduction de la concentration en micro-organismes. |
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Lait pasteurisé |
Pour les produits préparés à partir de lait chauffé à une
température d'au moins 72 °C pendant 15 secondes ou toute combinaison
équivalente. |
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Lait thermisé |
Température inférieure à la pasteurisation. Pour les produits
préparés à partir de lait chauffé à une température supérieure à 40 °C
et inférieure à 72 °C pendant au moins 15 secondes. |
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Lait microfiltré |
Pour les produits préparés à partir de lait écrémé traité
par microfiltration et de crème ayant subi un traitement thermique au moins
égal à une pasteurisation, notamment du point de vue de la réduction de la
concentration en micro-organismes, c'est-à-dire à au moins 80 °C pendant
15 secondes. |
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Source : Décret n° 2007-628 du 27 avril 2007 relatif aux
fromages et spécialités fromagères / 2007
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