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Jean-François Piège

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(Les Ambassadeurs - Hôtel de Crillon)
"Ma cuisine est à la fois traditionnelle et permissive"
Après avoir travaillé 15 ans auprès du plus étoilé des chefs français, Alain Ducasse, Jean-François Piège, 34 ans, est le nouveau maître du restaurant "Les Ambassadeurs" au prestigieux hôtel de Crillon, place de la Concorde, à Paris. (Avril 2004)

Vous avez toujours voulu être cuisinier ?
Jean-François Piège Non, j'ai longtemps voulu être jardinier… Mais, petit à petit, ma passion pour les plantations et la récolte des produits s'est transformée en passion pour les produits eux-mêmes, et finalement pour la cuisine. Aujourd'hui, ce qui m'intéresse, c'est la technique culinaire. Les moyens techniques ont révolutionné le métier de cuisinier. Par exemple, on peut chauffer de façon très précise avec les fours actuels.

Comment s'est passé votre apprentissage ?
Je suis de Valence dans la Drôme et j'ai fait l'école hôtelière de Tain-l'Hermitage. C'est amusant car, il y a quinze ans, j'ai été commis pendant deux ans au restaurant de l'hôtel de Crillon… et aujourd'hui je suis le chef de cuisine. J'ai beaucoup appris auprès de Bruno Sirino. Il m'a transmis son amour de la cuisine et il m'a fait rencontrer Alain Ducasse, un autre chef qui compte beaucoup pour moi.

Livre
Grand Livre de cuisine d'Alain Ducasse, De Gustibus, 2001, 1055 pages, 215  €.
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Qu'est-ce que cela fait de travailler pour le plus célèbre des chefs français, Alain Ducasse ?
On ne se pose pas de question quand on travaille. L'important, c'est de vivre des moments de cuisine. Alain Ducasse m'a appris l'excellence, il m'a donné les moyens d'assouvir ma passion.

Pourquoi avez-vous décidé de quitter le Plaza Athénée ?
On m'a proposé de devenir le chef du restaurant de l'hôtel de Crillon, j'ai saisi cette opportunité. En fait, ça a été une offre de Franka Holtmann, ancienne directrice générale de l'hôtel Plaza Athénée, devenue directrice générale de l'hôtel de Crillon.

Qu'est-ce que cela représente pour vous l'hôtel de Crillon ?
C'est un hôtel mythique, un des cinq grands palaces parisien. Quand j'étais commis il y a quinze ans, c'était un des leaders du marché. Nous souhaitons lui redonner sa place.

Vous visez les étoiles Michelin ?
Oui, mais notre premier objectif est de remplir la salle. Nous travaillons d'abord pour nos clients, pas pour les étoiles.

Comment définiriez-vous votre cuisine ?
Comme une "tradition permissive". J'ai reçu une formation de cuisinier traditionnel et en même temps, je fais parti de cette génération qui a connu les fraises tagada et les malabars… La cuisine, c'est quelque chose à un moment précis, dans une société donnée. On ne mangeait pas pareil il y a dix ans et on ne mangera pas pareil dans dix ans. Aujourd'hui, il y a une telle diversité qu'on ne fait plus de cuisine classique ; je ne dirais pas que la cuisine est mieux ou moins bien, elle est différente.

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Alors, comment se compose votre carte ?
C'est une carte très courte, elle ne comporte que douze plats, mais elle donne beaucoup de liberté. Il n'y a pas de menu figé, chaque client compose son menu (il existe des demi-portions) sur mesure avec le maître d'hôtel en fonction de ses goûts. C'est ça l'excellence, le vrai luxe en cuisine.

Créez-vous souvent de nouveaux plats ?
Je ne dirais pas qu'on "crée", mais qu'on "compose" des plats en fonctions des techniques du moment et des produits de saison. Comme la carte est courte, on change souvent les plats. Un mois après mon arrivée au Crillon, j'avais déjà changé 20 % de la carte.

Une recette dont vous êtes fier…
Nous avons réinterprété l'œuf cocotte et cela s'appelle "blanc à manger d'oeuf, truffe noire". Il s'agit d'un jaune d'œuf emprisonné dans une émulsion de blanc d'œuf parsemé de ciboulette et de truffes, cuit au four et servi avec de l'huile de ciboulette et du suc de truffe. C'est très fin et très léger.

Votre restaurant préféré…
La Régalade avenue Jean Moulin dans le 14ème arrondissement à Paris. Je prends beaucoup de plaisir à aller y manger. C'est un "trois étoiles" du bistrot. Il propose une cuisine de terroir du Sud-Ouest, région d'origine du chef. On y mange par exemple de l'épaule d'agneau avec des haricots de maïs.

Avoir un site Internet, c'est important pour vous ?
Oui, c'est essentiel aujourd'hui, c'est un outil de travail et de recherche d'information indispensable. Ca me sert par exemple à chercher un fournisseur dont j'ai entendu parler dans une région, à consulter l'actualité du métier, à acheter sur eBay des vieux livres de cuisines vendus aux enchères, etc.

Propos recueillis par Emilie Godineau


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