(AIHP)
"Avec le Label Rouge, on peut remonter jusqu'au champ où ont été cueillies les herbes"
Directeur de l'Association Interprofessionnelle des Herbes de Provence, Michel Krausz entend bien protéger ce patrimoine aromatique si cher au Sud-est de la France. Comment ? Grâce au premier Label Rouge dévolu à des herbes.
En quoi un Label Rouge était-il nécessaire pour les herbes de Provence ?
Michel Krausz
Depuis quelques années, les véritables herbes de Provence avaient quasiment disparu du marché au profit d'herbes venues d'Europe de l'Est. L'objectif était donc de faire renaître cette notion d'herbes de Provence en segmentant le marché pour rivaliser avec la concurrence. Nous avons donc choisi de passer par l'obtention d'un label, en nous appuyant sur l'image de la Provence.
Qui est à l'origine de cette initiative ?
Essentiellement des producteurs et des négociants, mais aussi des multinationales. Une entreprise comme Ducros, par exemple, nous a beaucoup aidé.
Comment un tel label peut-il relancer un produit ?
Le Label Rouge est avant tout la preuve de la qualité supérieure d'un produit. Avec tous ses critères et ses contrôles, cela reste le meilleur moyen de démontrer la grande qualité des herbes de Provence, et surtout de le faire comprendre au consommateur.
Ce label Herbes de Provence existe depuis un an et demi, les résultats sont-ils déjà visibles ?
Pour l'instant pas encore. Il est trop tôt, le label est trop jeune pour que les conséquences soient déjà sensibles au niveau de la production. Il faudra au moins attendre la fin de cette année. Et puis tout dépend également du soutien dont nous bénéficierons.
Pourquoi le Label Rouge ne porte que sur un mélange d'herbes (sarriette, origan, romarin, thym, basilic), et pas sur chacune d'entre elles ?
Vous savez, constituer un dossier pour un tel label est déjà très compliqué, c'est beaucoup de travail. Mais une fois qu'on aura acquis l'expérience suffisante, il est probable que l'on passe aux cas individuels.
Le mélange herbes de Provence se compose de 26% de sarriette, 26% d'origan, 26 % de romarin, 19% de thym et 2% de basilic. Comment a-t-il été mis au point ?
Nous avons rassemblé des professionnels spécialisés dans le domaine des plantes aromatiques, des agriculteurs, des metteurs en marché. Ils nous ont permis de retrouver la recette traditionnelle ancestrale du mélange herbes de Provence. Elle a ensuite été peaufinée après plusieurs tests consommateurs.
Quels sont les différents critères à respecter pour ce Label Rouge ?
Les principaux critères sont le taux d'huiles essentielles, ces composés aromatiques qui donnent aux herbes leur parfum, la couleur des plantes et la granulométrie, c'est-à-dire la taille des morceaux d'herbes dans le pot. Ces derniers doivent notamment être suffisamment gros pour être visibles par le consommateur, et pas réduits en poussière comme cela se fait parfois. Tous ces critères sont établis par la Commission Nationale des Labels et des Certifications en collaboration avec des professionnels.
Est-ce un label difficile à obtenir ?
Plutôt, oui. Son obtention représente de grosses contraintes, notamment au niveau technique. Il y a beaucoup de contrôles, et tout est tracé. A partir d'un pot d'herbes de Provence Label Rouge, on peut même remonter jusqu'au champ où ont été cueillies les herbes !
L'appellation Herbes de Provence est-elle protégée ?
Non, malheureusement tout le monde peut débarquer avec un pot d'une herbe quelconque et le vendre comme un mélange d'herbes de Provence. A vrai dire on aimerait protéger l'appellation par un label IGP (Indication Géographique Protégée) mais notre part de marché est insuffisante pour le moment. Nous représentons environ 20 tonnes d'un marché qui en compte jusqu'à 800 par an. Il faudrait au moins arriver à couvrir 300 tonnes pour que les autorités acceptent de nous donner l'IGP.
Quel est le rôle de l'AIHP ?
Il s'agit avant tout d'organiser la production en cohérence avec le marché, en garantissant une assistance technique et en créant un lien entre tous les partenaires. Ensuite, bien sûr nous nous efforçons de communiquer sur notre label, de le promouvoir. Mais, globalement, l'AIHP possède un rôle beaucoup plus technique et organisationnel que simplement marketing.
Vous comptez déjà un certain nombre de partenaires. Pensez-vous encore accueillir de nouveaux adhérents ?
Concrètement, il nous est impossible de fermer l'association à de nouveaux venus, mais connaissant le marché, je peux vous dire que la plupart des personnes concernées répondent déjà présent.
Propos
recueillis par David Alexandre
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