A la découverte des pays producteurs de thés et de leurs tasses : l'Inde
L’Inde, pays le plus grand producteur de thé du monde pendant longtemps, a cédé son premier rang à la Chine en 2006. De sa production de plus de 1,1 million de tonnes de thé, l’Inde n’exporte plus que 18%, dont les célèbres thés noirs du Darjeeling.
Les plantations de thé de l’Inde proviennent en partie de graines et de plants importés de Chine, exfiltrés par le botaniste écossais Robert Fortune en deux missions, entre 1843 et 1851 et installés dans la région du Darjeeling, les contreforts de l’est de l’Himalaya. Pour l’autre partie, elles proviennent d’un théier arbustif sauvage indigène qui a été identifié dés 1823 dans la jungle d’Assam par Robert Bruce. C’est après une longue discussion scientifique qu’il a été enfin reconnu officiellement comme le « camellia sinensis var. assamica » par la Royal Botanical Society de Londres en 1834. La culture commerciale de ce théier indigène adapté aux plaines tropicales a aussitôt été entreprise par la East India Company et de nos jours cette province dans le nord est de l’Inde est devenue la plus importante région théicole du monde. Son volume de thé manufacturé dépasse les 800 000t par an.
Cette précieuse activité agricole est devenue indienne en 1947, lors de l’indépendance du sous continent. Les cultures ont été étendues ensuite à d’autres provinces aux conditions climatiques et topographiques propices, notamment
**au Tamil Nadu et Kerala dans le sud, où se trouvent la chaîne des Montagnes Bleues – ou Nilgiris en hindi-,
**aux Dooars, Terrai et Bihar, situés entre les hautes collines du Darjeeling et les plaines torrides de l’Assam,
**à la haute vallée du Kangra, piedmonts himalayen de l’ouest, pas loin de Dharamsala, le grand refuge tibétain.
L’Inde possède donc des cultures de thé dans 4 régions bien définies et c’est l'industrie du thé qui est le deuxième employeur du pays. Il s’agit de thés noirs principalement, 97% de la production en sont. Notons aussi que plus de 90% de la production sont des thés noirs industriel CTC, destinés aux sachets et à la consommation de masse du marché domestique.
En 2011, l’Institut de Recherche sur le Thé, Tocklai TRI, établi par les Britanniques à Jorhat, Assam a fêté ses 100 d’existence, c’est dire que les travaux des ingénieurs agronomes et botanistes ont permis de considérablement améliorer les théiers, créant au fil des années des cultivars plus résistants, aux rendements plus élevés et aux qualités organoleptiques supérieurs.
Parmi les 200 000 t de thés exportés, on distingue les thés de grande consommation, qui passent aux ventes aux enchères, à Calcutta, Guwahati, Siliguri etc... et les thés fins en feuilles, ou thés orthodoxes, en provenance de grands jardins situés en altitude, au Darjeeling, dans les Nilgiris mais aussi de certains grands jardins de plaine , en Assam. Ces ventes se font de gré à gré sur échantillons.
Les scientifiques vous diront que les qualités aromatiques des feuilles de thé se développent quand la plante est stressée : par un important écart de température entre le jour et la nuit, par le vent et les brumes, par les fortes pluies et même par l’attaque de certains insectes. Bien sûr, ces plantes doivent avoir un patrimoine génétique riche et à fort potentiel, que l’on trouve surtout dans les théiers d’origine chinoise, à petites feuilles.
Pour les thés des altitudes, c’est généralement la reprise de la végétation après l’hiver qui produit les meilleures cueillettes, nommées First Flush au Darjeeling, que l’on récolte pendant 4 semaines environ de mars à avril. La deuxième récolte ou Second Flush qui intervient en début d’été est également très appréciée des amateurs, alors que pour les deux récoltes suivantes la richesse en saveurs des feuilles plus matures va diminuer progressivement. Dans le sud, les thés des Montagnes Bleues s’apprécient particulièrement en cueillette tardive, nommée « frost teas » ou thés des frimas.
En France, on trouve une superbe sélection de thés de l’Inde, et particulièrement en provenance du Darjeeling, souvent importés en direct par des négociants et maisons de thé avisés qui se déplacent en Inde chaque année pour dénicher des thés d’exception pour leurs clients. Lors de l’achat, il est conseillé de demander la région et la saison de la récolte, le plus souvent précisées en détails dans les catalogues et sur place dans les comptoirs. Assurez-vous que la feuille sèche dégage un parfum frais et typé et contentez-vous d’une première emplette de 50 g ou de 100 g, pour tester si la tasse vous séduit totalement. Un thé aux feuilles bien foncées et donc fortement oxydées sera infusé avec une eau proche de 100° pour 3-5 minutes ; des feuilles plus claires aux teintes brun-vert vous donneront d’excellentes tasses à 85°-90°. Rien ne vaut une petite expérimentation de mise au point par vous-même, avec votre matériel d’infusion et votre eau habituelle.
Notons qu’en Inde le thé se boit bouilli dans un lait agrémenté d’épices et fortement sucré : c’est le chai. Proposée en tasse, bol d’argile ou en verre c’est une boisson vraiment roborative ! Les thés fins et en feuilles de l’Inde que nous achetons en Occident se dégustent surtout natures, ou alors agrémentés d’un nuage de lait ou d’un quart de citron.
Considérant qu’il y a 87 grands jardins nommés au Darjeeling, une quarantaine de plantations nommées dans les Nilgiris et également des jardins de qualité en Assam, l’Inde vous offre un vaste univers de thés fins à explorer. Sans oublier les incontournables thés noirs CTC de l’Assam qui contribuent à toutes les nombreuses compositions de « break fast tea ».