Plats cuisinés : les recettes des industriels pour casser les prix
Choix des ingrédients, composition ou encore astuces de présentation : voici comment les coûts sont réduits au maximum.
Lait, volaille, saumon... Avec la hausse des coûts de matières premières, les industriels du plat cuisiné voient leur marge se réduire comme peau de chagrin. Pour éviter d'augmenter les prix tout en conservant leur bénéfice, ils multiplient les astuces.
Poulet brésilien ou français ?
Première solution : jouer sur l'approvisionnement de la matière première. Par exemple, un poulet acheté au Brésil coûte en moyenne un tiers de moins qu'un poulet français. Atlantique alimentaire, une PME qui produit des entrées surgelées, utilise des ingrédients différents en fonction de la gamme souhaitée. Une crêpe jambon fromage "discount", par exemple, revient 30% moins cher qu'une crêpe standard. Le jambon supérieur utilisé dans la crêpe standard est 50% plus cher que le jambon classique de la crêpe low cost. Et là où celle-ci contient un mélange de fromage fondu, la crêpe standard contient du vrai emmenthal râpé.
Les crevettes importées de Chine sont artificiellement gonflées avec de l'eau pour augmenter leur poids
Mais gare aux mauvaises surprises : "Dans beaucoup de cas, les crevettes importées de Chine sont artificiellement gonflées avec de l'eau pour augmenter leur poids", dénonce Olivier Pichot, un consultant spécialisé qui travaille avec des industriels de l'alimentaire.
Heureusement, il y a d'autres solutions. "Nous avons un partenariat avec des pêcheurs locaux, ce qui nous permet d'avoir des poissons moins cher qu'en passant par Rungis", nous explique Vincent Guittonneau, le responsable marketing chez Gendreau. Cette PME vendéenne fabrique des plats cuisinés sous sa propre marque ("La cuisine d'Océane") et pour les marques de distributeurs.
Du blé pour remplacer le bœuf
Deuxième piste : trouver des substituts aux matières qui coûtent le plus cher. "Dans un hachis parmentier, on peut par exemple remplacer les deux tiers de la viande par des protéines de blé deshydratées relevées d'un arôme bœuf", explique Olivier Pichot. Cette recette ferait baisser le prix de revient de 15 à 20%.
La dernière tendance, c'est la sauce aux légumes. "On remplace la crème fraîche d'un risotto par du lait en poudre lié avec de la pulpe de légumes", détaille Olivier Pichot. Ce dernier nous assure pourtant que le goût n'est guère différent, et rend même le plat plus léger.
La stratégie a toutefois ses limites. Au bout du compte, il faut s'attaquer à la composition même du produit. En gros, réduire la part des ingrédients les plus coûteux. Dans une quiche lorraine surgelée Marie, on ne trouve ainsi que 3% d'emmenthal.
Cette tendance est confirmée par tous les acteurs du marché. "Dans nos plats à base de volaille, nous réduisons la part de protéines pour la remplacer par des légumes", explique Vincent Guittonneau. "La vogue des plats exotiques n'est pas sans arrière-pensée, renchérit Olivier Pichot. Généralement ces plats contiennent une grande part de féculents, qui sont peu coûteux. Un wok dépasse rarement les 35% de protéines".
D'autres petites astuces permettent des économies. "On peut couper la viande en très petites lanières, ce qui donne l'impression d'en avoir plus", selon Olivier Pichot. Atlantique Alimentaire a lui réussi à réduire de 10% la garniture de ses crêpes low cost en... faisant une pate plus épaisse.
"On peut couper la viande en très petites lanières, ce qui donne l'impression d'en avoir plus"
Et quand tout cela ne suffit pas ? "On préfère carrément abandonner le produit", atteste Vincent Guittonneau. "Nous ne développons en ce moment plus aucun plat à base de saumon, car il a trop augmenté".
Dernier levier auquel ont accès les industriels : le processus de fabrication. L'usine d'Atlantique Alimentaire a plusieurs lignes de production en fonction de la gamme. Fabriquer des crêpes surgelées rectangulaires plutôt qu'en demi-lune permet par exemple d'en produire 150 000 supplémentaires par jour, grâce à une automatisation beaucoup plus avancée."Nous avons investi dans du nouveau matériel, ce qui nous a permis d'augmenter les cadences de production", ajoute Vincent Guittonneau.
Mais même avec tous ces stratagèmes, la plupart des fabricants ont du réduire leurs marges. "Il vaut mieux vendre 500 000 plats avec une faible marge que 500 plats avec une marge à 20 centimes", soupire Vincent Guittonneau, fataliste.