Patrice Lafon, chef de l'hôtel Dolce Frégate : "Le partage est essentiel en cuisine"

Il est depuis un an chef des cuisines de l’hôtel-golf Dolce Frégate situé à Saint-Cyr-sur-Mer. C’est dans ce cadre exceptionnel, à deux pas de la Méditerranée que Patrice Lafon laisse parler sa créativité. Il y propose une cuisine méditerranéenne aux saveurs d’ailleurs, utilise des produits de qualité issus de l’AMAP de la Ferme des Olivades à Ollioules, et souhaite avant tout surprendre et attiser la curiosité de ses clients. Rencontre avec un chef passionné.

Patrice Lafon, chef de l'hôtel Dolce Frégate : "Le partage est essentiel en cuisine"

Pouvez-vous nous retracer votre parcours ?

J’ai grandis au Pays Basque et intégré l’école hôtelière à Biarritz. Après avoir travaillé aux côtés de Christian Parra, je suis parti à Paris où j’ai intégré les cuisines de Jean-François Rouquette au Crillon.

Pourquoi être allé à Paris ?

On m’a toujours dit qu’un bon cuisinier devait obligatoirement passer par la capitale. Pour quelqu’un qui arrive d’un petit village comme le mien, le changement d’ambiance est brutal : tout va très vite mais il est important de s’accrocher.

Qu’avez-vous fait ensuite ?

Jean-François Rouquette m’a proposé un poste à La Villa des Lys à Cannes, pour travailler aux côtés de Bruno Oger. Une année seulement après mon arrivée, il était nommé Meilleur Cuisiner de l’année par le Gault-Millau. Ensuite, j’ai travaillé aux côtés de Philippe Labbey avant d’ouvrir un établissement à Monaco et reprendre le Grand Café de l’Opéra à Toulouse.

Pourquoi avoir accepté ce poste au Dolce Frégate ?

J’ai rencontré Monsieur Sancho, le directeur de l’hôtel et son discours m’a tout de suite plu. Le cadre exceptionnel a conforté ma décision. Quatre mois après mon arrivée, nous avons obtenu l’appellation Restaurant de Qualité décernée par le Collège Culinaire de France. Le prochain objectif, c’est l’étoile.

Quel type de cuisine proposez-vous ici ?

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce n’est pas parce que la mer est à côté qu’on ne cuisine que du poisson, au contraire ! La cuisine est méditerranéenne certes, mais contient des touches du Pays Basque avec du foie gras et du jambon que je fais venir de chez moi. Chaque assiette est réfléchie et cache une histoire.

Avez-vous un plat-signature ?

La seiche que je déstructure. Pour préparer ce plat, je réalise une farce à base de morue de Bilbao que j’accompagne de chair de tourteau et de coquillages. Quelques suprêmes de citron lui apportent du pep’s. La seiche est mixée puis étalée entre deux feuilles de papier sulfurisé avant d’être peinte avec de l’encre de seiche. Il ne reste plus qu’à la garnir de farce, et à la servir accompagnée de topinambours façon boulangère et d’une sauce à l’encre de seiche. Un conseil : l’encre de seiche teint les dents dont ne prenez pas ce plat lors d’un premier rendez-vous amoureux (rires).

Seiche zébrée d'encre, farcie de chair de tourteaux et coquillages, topinambours © Jérôme Chapman

Vous travaillez avec l'AMAP Les Olivades (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne). Pouvez-vous nous parler de cette collaboration ?

Aujourd’hui, il y a des AMAP partout en France mais il faut savoir que la première a été créée à Ollioules par Monsieur Vuillon. C’est un homme passionnant et passionné et ses produits sont d’une qualité exceptionnelle. Chaque jour nous sont livrés des fruits, des légumes et des herbes. Nous composons notre cuisine avec ses bons produits.

Vous avez créé un plat en hommage à Monsieur Vuillon d’ailleurs…

Il s’agit du Potager de Monsieur Vuillon, tout simplement. L’idée était simplement de recréer son potager. Nous avons donc une purée d’avocat pour l’onctuosité et un crumble végétal à base de charbon végétal, pain, beurre, farine et basilic pour représenter la terre. Au-dessus, plusieurs fruits et légumes sont posés, cuits et crus. Au moment du service, on vaporise de l’huile de bergamote, vinaigre de pomme et grenade sur l’ensemble pour assaisonner et représenter la pluie. Les légumes sont brillants comme après une averse lorsqu’ils brillent au soleil. La fleur de sel représente les jours de grêle et le poivre les petits moucherons présents dans le potager. Tout a été pensé (rires) !

Vous a-t-il fait découvrir des produits ?

Bien sûr ! Le chou-rave, que je n’avais jamais travaillé, ou la pastèque du désert… Extraordinaire, non ? Monsieur Vuillon me fait surtout redécouvrir des produits qu’on a l’habitude de manger tous les jours, mais que l’on achète mal. Ce sont des produits que l’on mangeait il y a 20 ans : de la fraise avec le goût de fraise, la tomate avec le goût de tomate, ou la carotte avec le goût de carotte…

Quel est le secret d’un bon chef selon vous ?

On fait un métier de partage, il est donc important de communiquer notre passion de la cuisine avec notre équipe mais aussi avec les clients. Il faut être exigeant avec soi-même et avec les personnes qui nous entourent. C’est comme ça qu’on évolue et qu’on se surpasse.

Le partage est essentiel pour vous ?

Bien sûr ! J’aime transmettre ma passion. Quand je viens expliquer les plats à table aux clients, c’est important de voir la réaction des clients, c’est un moment précieux. Je ne suis pas une star, je ne suis qu’un artisan cuisinier. Ce métier est passionnant, le plus beau métier du monde selon moi mais je n’y arriverais pas sans mon équipe qui est à mes côtés.

Plus d'informations : Hôtel Dolce Frégate

Hôtel Dolce Frégate, Saint-Cyr-sur-Mer © Jérôme Chapman