Les Marseillais y croient dur comme fer, mais le premier pastis n'est pas né en Provence
Quand on tente de leur voler leur pastis, les Provençaux s'insurgent. Et pourtant, ils vont devoir accepter de partager sa paternité avec leurs voisins du Sud-Ouest...

Quand on vous dit "pastis", vous vous projetez dans un de ces bars marseillais, un verre à la main, bercé par les stridulations des cigales et les carreaux des pétanqueurs. En Provence, cette boisson spiritueuse, variante de l'absinthe, s'affiche comme une véritable institution à l'apéro. Popularisé dès 1932 par Paul Ricard dans la cité phocéenne, le "jaune", comme on l'appelle là-bas, se distingue par une saveur anisée très caractéristique, laissée par la badiane et l'anis vert. Titré entre 40 et 45 % d'alcool, il pâlit et se trouble dès qu'on le dilue dans l'eau – un phénomène plus connu sous le nom de louchissement, ou effet louche.
Si les origines du pastis ne semblent pas donner matière à débat, une autre région française en revendique pourtant la paternité : les Landes ! Autant dire que les Méditerranéens sont déjà vent debout. Mais aussi surprenant que cela puisse paraître, leurs rivaux du Sud-Ouest ont raison. C'est juste qu'ils ne parlent pas du tout de la même chose...
Il faut en effet savoir que le pastis est aussi "le" gâteau traditionnel landais. Une brioche à la fois compacte et très fondante, parfumée à la vanille, au rhum, à l'anis ou à la fleur d'oranger, qui remonterait au XVIIe siècle... donc bien antérieure à la mise au point de la boisson alcoolisée. En gascon, pastis signifie d'ailleurs "pâte".
Si ses secrets de fabrication sont jalousement gardés, @aurore.cookbooks a réussi à mettre la main sur une recette historique qu'elle a retranscrite sur Instagram :
"Faire un levain avec un quart de farine, 18 grammes de levure, eau. Préparer un sirop avec 200 grammes de sucre, un demi-verre de fleur d'oranger, un quart de verre de rhum, le zeste d'un citron, faire tiédir en évitant l'ébullition. D'autre part, prendre 500 grammes de farine, faire une fontaine, mettre du sel, cinq œufs, fondre le tout avec une partie du sirop, pétrir, donner du corps à la pâte, refaire une fontaine et ajouter le restant du liquide ; travailler de nouveau cette pâte, mettre un peu d'eau tiède si la pâte est trop dure, de façon qu'elle soit mollette : incorporer alors 200 grammes de beurre fondu tiède, mélanger le levain en dernier, laisser dans un endroit chaud cette pâte jusqu'au lendemain. Mettre alors en moules en charlotte garnis à moitié, laisser lever jusqu'aux trois quarts du bord, cuire à four doux". Avouez que ce n'est pas tous les jours qu'on peut petit-déjeuner au pastis sans modération...
En Provence comme dans les Landes, le pastis raconte une histoire de terroir, de transmission et de convivialité. Qu'il soit doré dans un verre ou brioché dans un moule, il incarne à sa manière l'art de vivre à la française : généreux, parfumé et ancré dans les traditions régionales. Alors, boisson ou gâteau ? Peu importe finalement, puisque dans les deux cas, le pastis se savoure en bonne compagnie… et sans se prendre trop au sérieux !