"Les émissions culinaires ne sont pas toujours réalistes" selon Claire Heitzler "Travailler le sucre m'éclate"

claire heitzler, chef pâtissière du restaurant lasserre à paris, et coach de
Claire Heitzler, chef pâtissière du restaurant Lasserre à Paris, et coach de l'Équipe de France pour le Mondial des Arts Sucrés 2014. © Agence Marie-Antoinette

Le Journaldesfemmes.com : Pourquoi avoir choisi la pâtisserie ?
Claire Heitzler : J'ai découvert le goût de la restauration assez jeune. Des amis de mes parents avaient un restaurant, j'y travaillais souvent en "extra", en cuisine et en salle. J'ai tout de suite su que j'allais me tourner vers les métiers de bouche. J'ai fait un BEP puis un Bac Pro, puis je me suis spécialisée en pâtisserie, car c'est ce qui m'intéressait le plus.

" C'est le travail du sucre qui m'apporte le plus de plaisir en cuisine "

Vous aviez un palais plus sucré que salé ?
Forcément. A l'époque, je ne me sentais pas prête à bosser en entreprise, je savais qu'il fallait que je continue à progresser, mais aussi que je n'avais pas encore trouvé ma voix à 100%. Je me suis rendue compte que c'est le travail du sucre qui m'éclatait le plus, qui m'apportait le plus de plaisir en cuisine.

Quelles sont les étapes qui ont marqué votre parcours professionnel ?
J'ai commencé ma formation en boutique à l'âge de 18 ans, chez Thierry Mulhaupt à Strasbourg. Je suis repartie dans la restauration deux ans plus tard, à Troisgros à Roanne. C'est une maison où j'ai énormément appris. Autre étape importante pour moi : mon départ à Tokyo, où j'ai travaillé pour Monsieur Ducasse, qui m'avait sollicitée pour prendre le poste de chef pâtissier dans un restaurant qu'il venait d'ouvrir, en partenariat avec Chanel. Cela a été un grand moment de ma vie professionnelle, j'y suis restée trois ans. Au retour du Japon j'ai atterri à Dubaï, une belle expérience également, avant de poser mes valises au restaurant Lasserre, depuis 2010.

Si vous n'aviez qu'une seule personne à retenir dans ce riche parcours, qui serait-elle ?
Oh, il n'y en a pas eu qu'une ! Plusieurs personnes m'ont permis d'évoluer dans ma carrière : il y a eu Sébastien Degardin, qui était à l'époque chef pâtissier chez Troisgros, Philippe Le Lay, qui m'a mis en relation avec le groupe Ducasse, Monsieur Ducasse lui-même, puis évidemment Thierry Mulhaupt, mon premier patron, car c'est lui qui m'a appris toutes les bases.

Le monde de la pâtisserie est-il plus masculin que féminin ?
Il l'est oui, même si c'est en train d'évoluer. Quelque part, c'est normal : la pâtisserie est un métier assez physique. Il y a 50 ans, il fallait être capable de l'encaisser physiquement. C'est différent aujourd'hui : on a des machines, des conditions de travail différentes, le conditionnement des matières premières n'est plus le même. C'est un métier plus accessible, qui se féminise. Cela se voit dans les écoles de pâtisserie qui comptent aujourd'hui entre 30 et 45% de filles contre 5% auparavant.

" Mes desserts ? Ni trop sucrés ni trop gras, assez légers en général "

Quel type de pâtisseries trouvons-nous sur les cartes de votre restaurant ?
Déjà, on ne travaille que des produits de saison. Les desserts que l'on fait ne sont ni trop sucrés ni trop gras, assez légers en général. On travaille beaucoup sur les fruits et sur l'acidité. On se met à la place du client qui vient manger, qui après menu dégustation avec quatre à cinq plats salés, enchaîne sur deux desserts. C'est plus agréable de sortir avec l'estomac repu plutôt que saturé. Qu'il ne rentre pas chez lui avec des maux de ventre ! On joue donc la carte de la légèreté.

Après presque 4 ans au restaurant Lasserre, avez-vous des envies d'ailleurs ?
Aujourd'hui je suis bien là où je suis : j'ai une équipe au top, l'établissement me donne les moyens de travailler avec des produits et du matériel de qualité. Je me fais plaisir et je ne cherche pas forcément à bouger.

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