Confidences de Claire Heitzler, une cheffe bien de son temps
Parce que donner du plaisir est le credo des chefs, 12 d'entre eux ont accepté de prendre la pose dans un calendrier au profit de l'association "Tout le monde contre le cancer". La pétillante Claire Heitzler s'est fait tirer le portrait et nous explique son engagement. Rencontre.
Quitter le feu des fourneaux pour celui des projecteurs : c'est ce que 12 chefs ont accepté de faire au profit de l'association Tout le monde contre le cancer. Yves Camdeborde, les deux Christophe (Michalak et Adam), Christian Le Squer ou encore Xavier Pincemin : tous ont pris le temps de poser avec des enfants malades. Leurs sourire et complicité, capturés par le photographe Stéphane de Bourgies, sont à découvrir dans le calendrier 2017 vendu au doux prix de 12 €. Les fruits récoltés permettront de reconduire l'opération Toques en Truck. Initiée en 2016, elle a permis d'envoyer un camion food-truck sur les routes de France pour faire escale dans des établissements hospitaliers et offrir des animations culinaires aux enfants malades et leur famille. Sensible à la cause, la discrète Claire Heitzler a accepté de se faire tirer le portrait. Participation au calendrier, importance des médias, combat pour l'écologie : la directrice de la pâtisserie de Ladurée s'est confiée sur des problématiques bien de son temps. Interview.
Le Journal des Femmes : Pourquoi avoir accepté de "prêter" votre image au calendrier ?
Claire Heitzler : Pour me rendre utile. Aujourd'hui, notre notoriété de chef nous permet de donner de la visibilité à des mobilisations, des associations. Cela me paraissait important d'utiliser la mienne pour cette cause qui me tient à cœur.
N'appréhendiez-vous pas trop le shooting ?
Je connais bien Stéphane de Bourgies, ce qui était rassurant. Il travaille efficacement ce qui évite de saturer trop vite lorsque l'on pose pendant des heures. Cela m'a permis aussi d'être à l'aise avec Nassima et Emma, les deux petites filles qui ont pris la pose à mes côtés. Au départ, elles étaient très intimidées. Lorsqu'elles se sont senties en confiance, nous avons passé un super moment. C'était aussi très émouvant de voir leur maman, émue. Elle était très touchée par la photo qui reflétait la personnalité, le regard et le sourire de ses filles. Elle était bouleversée et moi aussi.
La philosophie de l'association Tout le monde contre le cancer est "Tant qu'il y a de la vie, il y a de la joie". Qu'est-ce qui vous procure de la joie ?
Procurer du plaisir aux gens. J'ai un métier formidable qui touche à la gastronomie. Or, on est forcément tous un peu gourmand, on aime tous prendre du plaisir à manger des bonnes choses. Contribuer à ces moments de bonheur, c'est fantastique.
Et qu'est-ce qui vous fait sentir vivante ?
L'échange, le partage de mes expériences, le fait de pouvoir voyager, de découvrir de nouvelles choses. Et de rester ouverte à la découverte justement !
Auguste Escoffier himself était un précurseur avec ses dîners d’Épicure, considérés comme les premiers repas caritatifs de l'histoire. Comment expliquez-vous que les chefs n'aient qu'un récent poids médiatique alors que leur engagement ne date pas d'hier ?
Majoritairement par les émissions de télévision qui ont valorisé et désacralisé le métier de cuisinier. Cette mise en avant a été bénéfique pour les chefs et certains se sont enfoncés dans la brèche. Aujourd'hui, communiquer sur les réseaux sociaux est presque devenu un réflexe dans notre métier.
Vous êtes la seule femme cheffe du calendrier : preuve d'un manque persistant de parité ?
Ce ne sera bientôt plus le cas. Il y a quasiment autant de jeunes femmes aujourd'hui dans les écoles hôtelières et de pâtisserie. Il faut encore un peu de patience mais lorsqu'elles auront acquis l'expérience, l'équilibre se fera.
Vous avez également donné votre signature pour une Lettre ouverte contre l'invasion de l'agrochimie dans les assiettes. En quoi les chefs sont-ils également moteurs dans la bataille écologique ?
Je ne sais si nous sommes des moteurs mais on essaie d'être dynamiques. Aujourd'hui, si l'on arrive à faire plaisir à nos clients, c'est grâce aux producteurs qui travaillent d'arrache pied la terre, tout en la respectant. On se doit de les défendre car ils sont à la base de notre travail. Le jour où les bons produits disparaîtront, nos métiers en seront affectés. C'est donc essentiel de se battre, même si l'on sait que notre bataille est semée d'embûches et qu'elle est menée contre des mastodontes... C'est une petite pierre à l'édifice, mais une petite pierre quand même.
Les fêtes de Noël approchent. Est-ce une période que vous appréhendez ?
J'essaie de rester sereine car c'est toujours une période intense et chargée pendant laquelle tout le monde est à cran, fatigué. C'est essentiel d'arriver à travailler dans la bonne humeur et de soutenir mes équipes. D'être là pour eux.
Quel bilan faites-vous de l'année 2016 ?
Ce fut une année assez riche, pleine de rencontres, de nouveaux challenges. Elle a été la preuve que l'on peut continuer à apprendre et évoluer année après année. C'est dans l'apprentissage que je puise la motivation. Cela me donne la pêche et me convainc que je suis dans la bonne voie.
Déjà des bonnes résolutions en tête pour 2017 ?
Je n'y ai pas encore pensé… Mais professionnellement, continuer à m'amuser, rester dans une dynamique, ne pas vivre sur mes acquis.
Avez-vous une madeleine de Proust des fêtes ?
Les brioches alsaciennes en forme de petits bonhommes que l'on appelle en Alsace, les "manalas". Ces gourmandises m'évoquent le soir de la Saint-Nicolas lorsque nous les dégustions avec un chocolat chaud et des clémentines. Leur pensée m'évoque pleins de bons souvenirs.
Est-ce un produit que vous pourriez proposer chez Ladurée ?
Cette année fut chargée. Quand on reprend les commandes d'un si gros bateau, il y a tellement de choses à faire qu'il faut aller à l'essentiel. Mais pourquoi pas à l'avenir…
Pour commander le calendrier (12 € + 4 € de frais de port payable par chèque ou carte bleu par paypal), rendez-vous sur Tout le monde contre le cancer