"Toucher l'âme des gens par la gourmandise", le credo de Philippe Conticini "Je veux pouvoir toucher l'âme des gens"
Pourquoi avoir choisi la carrière de pâtissier ?
J'ai eu une enfance difficile car j'étais assez gros. Cette différence a fait que les autres n'avaient pas envie de me connaître et ne s'intéressaient pas à moi. Tant que je n'arrivais pas à assumer mon propre regard, les autres ne pouvaient pas me regarder. La première fois qu'une personne a goûté mes pâtisseries, elle m'a dit "vous m'avez touché l'âme". Je me suis enfin senti exister, il n'y avait plus de différence entre eux et moi. Je me suis dit que je devais continuer à faire ça pour que les autres s'intéressent à moi. J'ai ouvert ma première pâtisserie en 1986. L'aventure pouvait commencer.
Vous êtes l'inventeur d'un concept devenu un classique : les verrines. Comment vous est venue cette idée ?
Oui c'est vrai. En 1994, j'ai réalisé un dessert, mais sur l'assiette, il ne me plaisait pas. J'ai décidé de le restructurer dans un verre à bourgogne. Deux ans plus tard, je l'ai miniaturisé en utilisant des verres à vodka. A cette époque, comme je n'avais pas encore suffisamment de force médiatique pour imposer l'idée, je la protégeais pour éviter qu'on me la vole. Dès que des chefs venaient dans ma pâtisserie, je remettais les desserts en assiette ! C'est finalement Joël Robuchon qui a médiatisé le concept des verrines tout en spécifiant qu'il était issu de mon imagination. Ça a fait un carton.
Vous travaillez avec Angelo Musa. Quels rapports entretenez-vous ?
"L'excellence est de mettre ce que l'on est dans ce que l'on fait."
Nous nous sommes rencontrés en 2003, alors qu'Angelo préparait la Coupe du Monde de Pâtisserie. On se complète car on a tous les deux des personnalités différentes mais le même sens du partage. Lorsqu'on créé une nouvelle pâtisserie, on se réunit avec le personnel du Labo (ndlr Le labo se situe à Saint-Ouen. C'est dans ces 600 m² que Philippe Conticini et Angelo Musa créent les nouvelles pâtisseries). On n'hésite pas à critiquer dès qu'il le faut. C'est important de savoir accepter la critique même si elle peut être dure, car c'est elle qui nous permet de nous bonifier.
Qu'est-ce qui vous stimule dans ce métier ?
J'aime pouvoir créer des pâtisseries qui me plaisent. Si elles plaisent aux autres, c'est mieux car cela créé un échange avec les gens. Ils ont envie de parler avec vous et de partager leurs émotions. Ce partage entre le pâtissier et le consommateur est indispensable à mes yeux.
Sur quoi basez-vous ce partage ?
Selon moi, le consommateur doit pouvoir sentir la personnalité de la personne qui a concocté le plat ou la pâtisserie qu'il déguste. C'est le plus important. Au-delà d'un simple mélange de produits entre eux, il faut réussir à percevoir la personnalité du cuisinier. C'est ainsi que l'on peut toucher l'âme des gens, communiquer avec eux et partager. Finalement, on ouvre notre personnalité aux autres avec la pâtisserie.
Selon vous, qu'est-ce que l'excellence en pâtisserie ?
Pour moi l'excellence, c'est de mettre ce que l'on est dans ce que l'on fait. Il faut vivre avec le produit, et que le produit fini soit finalement un miroir de votre personnalité.